J'avais déjà tenté l'inscription à l'OCC (la plus petite des courses organisées dans le cadre de l'UTMB, 55 kms et 3500m de dénivelé entre Orsières et Chamonix) l'année dernière, mais je n'avais pas été retenue au tirage au sort. Je retente ma chance au mois de janvier, et cette fois c'est bon! A moi Chamonix!! Je connais la partie Champex-Chamonix, commune à l'UTMB, pour l'avoir faite avec Mailys il y a deux ans. Je sais combien les paysages sont sublimes. C'est peu de dire que je vais me régaler et que j'ai hâte d'y être! L'euphorie passée je commence à douter : les barrières horaires me font peur avec mon allure d'escargot, et je me demande bien comment je vais me préparer au dénivelé en région parisienne... . On organise quelques stages commando-weekends chocs du côté de Grenoble chez ma Séverine. A chaque fois des journées de rêve à enchainer les kilomètres et le d+, entre Chamechaude, le grand som ou encore le grand colon. On peaufine le tout avec une grosse semaine de rando en chartreuse avec Yanne, Mumu, Béa, et Béné, et emballé c'est pesé! A l'approche du jour J je me répète les mots de Séverine "tu es prête, tu as toutes les cartes entre les mains. Tu manges, tu bois, et ça va le faire!!" Bon, ça ne coute rien d'y croire hein! LOL
Mardi 23 aout :
Le trajet vers Chamonix se passe sans problèmes. Nous arrivons avec maman en milieu d'après midi. Le temps de se poser à l'hôtel et on va prendre nos repères pour la suite de la semaine : le lieu où aura lieu le retrait des dossards le lendemain, le village des exposants. C'est énorme, je suis surexcitée! On croirait une gamine dans un magasin de jouets le jour de noel! On rencontre Xavier Thevenard, Stéphane Brogniart, et Emilie Lecomte. Anton Krupika aussi, que je faillis ne pas reconnaitre parce qu'il porte un tee shirt (tout fout le camp ma bonne dame!) Tous des champions hyper accessibles, simples. Je prends tous leurs conseils : Emilie par exemple me dit de me constituer dans ma tête comme une "banque d'images" de pensées positives, de bons souvenirs, auxquels je penserai quand ça n'ira pas pendant la course. C'est bête mais je ne l'avais jamais fait jusque là. Et les bons souvenirs, les bonnes ondes, ce n'est pas ce qui manque pourtant!!
Mercredi 24 aout :
J'ai rendez-vous avec Cécile, Sébastien Chaigneau, Lizzie Hawker, et d'autres coureurs à 9h30. Au départ je devais courir avec eux, environ 10kms. Mais je n'avais pas calculé que le retrait des dossards doit s'effectuer entre 10h et 13h. En plus j'ai peur de ne pas suivre le rythme, et de me griller la veille de la course. Je me contente donc simplement d'aller au rendez-vous, faire quelques photos et papoter un peu. C'est top de retrouver Cécile! J'en profite pour glaner encore quelques conseils auprès de Sébastien : il va faire chaud demain, il faudra penser à m'arroser régulièrement, en priorité l'entre jambe et les aisselles me dit il. Elégance, raffinement, grâce, j'adore le trail! LOL
Direction le retrait des dossards maintenant. Il y a déjà pas mal de monde mais ça s'enchaîne plutôt bien. L'organisation est parfaitement réglée. On vérifie mon matériel et on me remet le fameux sésame rapidement. Je suis surprise de voir devant moi Xavier Thevenard (futur vainqueur) lui aussi retirer comme tout le monde son dossard, et se soumettre sans soucis à la vérification du matériel.
On rentre ensuite à l'hôtel, un bon repas, une petite sieste et on retourne flâner un peu dans Chamonix, du côté de la ligne d'arrivée. Séverine nous rejoint et la soirée se passe tranquillement, à encourager les arrivées de la TDS.
Jeudi 25 aout.
Le réveil sonne à 4h30. J'avais prévu de prendre les navettes de l'organisation pour aller au départ, mais finalement, comme Séverine et maman sont là, elles m'emmèneront en voiture à Orsières. Royal et tout confort! Je profite du trajet pour comater un peu, et prendre mon petit déj. A l'arrivée à Orsières la première préoccupation, comme sur chaque course : où sont les toilettes?! Et la question question subsidiaire : où est mon café?! (merci maman pour le café déniché!) Ces formalités incontournables effectuées on retrouve Cécile. Papotage, photos. Maman et Séverine me quittent : elles m'attendront à Champex, au 10ème kilomètre.
Le départ est donné à 8h15, et c'est un des plus beaux que j'ai vus jusqu'à présent : les enfants des écoles sont répartis par ordre de classe dans tout le village. D'abord les tous petits, puis les primaires, et enfin les collégiens. Ils donnent tous de la voix pour nous encourager. Super émouvant cette mobilisation!
Orsières - Champex : cette partie est plutôt tranquille. Quelques coups de cul un peu raides, mais je ne souffre pas encore de la chaleur. Les jambes sont super bien, je me sens en pleine forme. Seul point à revoir : mon sac est hyper lourd! Avec tout le matériel obligatoire et la réserve d'eau ça pèse très très lourd. Le peloton est dense mais je peux tout de même courir sans soucis. Un seul bouchon à signaler juste avant Champex, où nous sommes à l'arrêt dans une côte. A champex mes deux anges gardiens du jour m'attendent. Je ne m'attarde pas, tout va bien encore.
Champex - Trient : en sortant du ravito nous longeons le lac pendant un bon kilomètre avant de revenir en forêt. Je m'éclate sur cette partie! Pendant 5-6 kilomètres le terrain est très facile, majoritairement en faux plat descendant. Je déroule tranquillement, juste freinée dans mon élan à un moment donné par une famille de randonneurs qui marchent avec 4 ânes. On attaque ensuite la montée de bovine. La forme est toujours excellente. Que c'est beau!!! Je profite du paysage à fond. Dans la montée, en train d'engloutir ma barre clif aux myrtilles, j'ai un grand sourire sur le visage en me disant que la vie, c'est quand même un truc vachement cool!! Il commence à faire très chaud. A chaque fois que je croise un cours d'eau ou une fontaine j'en profite pour mouiller ma casquette et suivre les bons conseils de Sébastien Chaigneau. J'ai la surprise de rattraper Cécile : je pensais qu'elle était loin devant! je pointe à la Giète, puis on entame la descente sur Trient. Je suis euphorique. Tellement euphorique d'ailleurs que je me paye le gadin du jour. Un petit check up : tout va bien, juste de la tôle froissée. Rien de grave. Reste concentrée ma grande, c'est pas le moment de te blesser. Arrivée à Trient Séverine m'informe que j'ai environ 1H30 d'avance sur la barrière. Ca me tranquillise un peu, même si je sais que le chemin est encore long. Je refais le plein d'eau (cette foutue poche ne veut pas refermer!! L'assistance est interdite sur tout le parcours mais Séverine me donne quand même un coup de main...Catherine Poletti ne lit surtout pas ces lignes, je sais c'est maaaal!!! LOL ) je m'asperge un bon coup, et je vais piquer des tucs et du pain au ravito. Je ne tarde pas à repartir. Grosse erreur, n'est ce pas Séverine! J'aurais du prendre plus le temps de me poser à l'ombre à trient, décompresser.
Trient-Vallorcine : je suis toujours aussi euphorique. Quelques centaines de mettre et on entre dans la montée de Catogne. On est en plein cagnard, et très vite je sens que ça ne va pas le faire. Purée ce coup de mou!! je prends très très cher. Nausées, grosse fatigue, j'ai l'impression que je vais tomber dans les pommes. Je me souviens de Séverine qui s'était assise sur un caillou l'année dernière pendant 10' sur la CCC pour mieux repartir ensuite. C'est ce que je décide de faire. Sauf que je dois manquer de lucidité, je m'assois en plein soleil! Une coureuse tente de me raisonner "Ca va? Reste pas là tu es en plein soleil!" "mais si, je suis bien là, fais pas trop chaud, ça va" Elle m'empoigne par le bras pour me relever et me faire avancer à l'ombre, un peu plus haut. Je reste assise 10', la tête entre les jambes. Puis je tente de reprendre ma route. Si la forme est encore précaire, au moins les nausées se sont un peu calmées. Je peux remanger normalement. Cécile me rattrape, et je ne peux pas l'accrocher. Chacune sa course de toutes façons, chacune son rythme. L'essentiel, pour moi, est de rallier Chamonix. C'est le moment d'appliquer la méthode Emilie Lecomte : je convoque un maximum de pensées positives, de bonnes ondes, et tant bien que mal j'atteins le pointage de Catogne. J'entame prudemment la descente vers Vallorcine. Les jambes commencent à être bien lourdes, moins réactives. Il faut rester concentrée jusqu'au bout. J'arrive au ravito de Vallorcine. Mireille est là, avec Sév et maman. Je prends le temps de boire de l'eau pure (dans mon Camel j'ai du jus de raisin dilué dans l'eau) et de bien me ravitailler. Cécile sort du ravito au moment où j'arrive. Elle m'encourage à bien manger. Après avoir pointé je m'assois sous un arbre un peu plus loin. Cette pause fait beaucoup de bien. Séverine me briefe sur le reste du parcours : un faux plat montant plutôt facile jusqu'au col des montets, et ensuite la grosse montée jusqu'à La flégère. Elle me rassure aussi : je suis large sur les barrières, je ne dois pas m'affoler.
Vallorcine-Chamonix : Je me remets en route tranquillement. Effectivement cette partie est facile. J'en profite. Je pensais revoir mes deux anges gardiens uniquement à Chamonix, c'est ce qui était prévu, mais j'ai la super surprise de les voir au col des montets. Ca me booste avant d'attaquer la dernière difficulté du jour. C'est parti pour la Flégère! Même pas peur...enfin pour l'instant! La forme est pas trop mal et il commence à faire un peu moins chaud. Je sais que cette partie sera un peu différente du parcours de l'UTMB. L'UTMB monte jusqu'à la tête au vent avant de redescendre à la Flégère. Je ne sais pas par où nous allons passer. Enfin pour l'instant ça monte, ça monte comme prévu!! Je vois de plus en plus de coureurs qui s'arrêtent sur le bord du chemin. On arrive à une bifurcation. Pour la tête au vent, c'est à droite, nous on pique à gauche. Et tout de suite je me dis qu'en fait j'aurais presque préféré monter jusqu'à la tête au vent!! On redescend pendant un temps interminable dans des caillasses et des racines. Les quadris crient au secours, les chevilles et les genoux se demandent ce qu'ils ont bien pu faire dans une vie antérieure pour mériter ça. Je n'en peux plus! Et que dire de la grande remontée sur la Flégère ensuite, juste interminable. Je n'en vois pas le bout. Une pause noix de cajou tucs s'impose si je ne veux pas me mettre en boule en pleurant sur le bord du sentier! Ca me remonte le moral. La tente ravito n'apparait qu'à la dernière minute, je n'en peux plus! J'arrive à la Flégère en mode zombie (cf la vidéo du live). Pause pipi et j'attaque la descente finale. Il reste 8 kilomètres. Je sais que la première partie est très chiante, et je suis bien contente qu'il fasse encore jour pour la passer! Il y a des racines et des cailloux partout, j'y vais prudemment, je ne me laisse pas griser par l'arrivée qui approche. J'attends avec impatience le passage de la Floria : après, le sentier se transforme en billard, il n'y a plus qu'à dérouler tranquillement. On voit de plus en plus de monde venu à la rencontre des coureurs. Les encouragements font un bien fou! Les jambes sont hyper dures, je n'ai plus de jus mais maintenant je sais que je vais le faire. L'arrivée est juste incroyable. Plus j'avance, plus les spectateurs sont nombreux. Ca encourage dans toutes les langues (je me souviens d'une famille espagnole me hurlant "venga venga venga!!"). Et tout à coup au bord de la route Sébastien Chaigneau est là, tout sourire! Il me reconnait. Je m'arrête pour le remercier de ses conseils. On commence à discuter, mais voyant que je tape l'incruste et que j'ai pas l'air décidée à redémarrer il me fait "eh, t'as pas une course à terminer?" "euuuh, voui, j'y vais alors!" Enorme!! LOL Un dernier virage et c'est la ligne droite vers l'arche. Maman et Séverine sont là. Qu'est ce que c'est bon de partager ces moments avec elles, quelle émotion! Mireille et Sandrine nous rejoignent ensuite. La première chose que je remarque c'est ces belles polaires finisher qu'on nous remet! J'y crois pas!!! Elle est parfaitement à ma taille en plus! 12h25, soit 2 heures avant cette foutue barrière horaire qui me faisait si peur!
Vendredi 26 aout
Après une journée de glandouille-repos, nous assistons avec maman au départ de l'UTMB. Les larmes aux yeux, le grand frisson! Moi aussi, un jour, quand je serai grande, je serai à ce départ mythique, parmi tous ces coureurs!!
Un énorme merci à maman pour sa présence, avant, pendant et après la course. Sans toi je ne pourrais tout simplement pas réaliser mes petits délires!
Merci, merci et merci aussi à ma coach d'exception Séverine pour tout ce que tu m'apportes (en course et en dehors), tous ces weekends de rêve en montagne! C'était génial, et il va falloir qu'on se refasse ça très vite! Je vais finir par prendre une carte grand voyageur pour Grenoble moi! ;)
Enfin merci à Mireille et Cécile pour le soutien pendant toute la course!
Prochain défi, le grand raid des cathares (100kms et 4500m d+) le 14 octobre prochain, à faire en moins de 27h30.
Le lien vers l'ensemble des photos : https://goo.gl/photos/Ca7ED9LjkCZCsV3S9
Et vers le suivi live : http://www.utmb.livetrail.net/coureur.php (dossard 9738)